Bonjour à tous.
Vallon de Artiga de Lin, Val d’Aran, Espagne.
Nous voici au départ d’une randonnée qui doit nous faire découvrir la « vraie » source de la Garonne.
Enfin, vraie pour nous Français. Car pour les Espagnols, cette source se trouve un peu plus loin dans le Val d’Aran, au Pla de Beret.
Source Wikipedia :
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, l'origine de la Garonne est sujette à polémique. Selon la légende, la résurgence du Guelh de Joèu dans le val d'Aran, principale source de la Garonne, communique avec la perte du Trou du Toro, situé dans la haute vallée de l'Esera, dans les Pyrénées espagnoles, en Aragon. Cette thèse combattue par Émile Belloc finit par ne plus être admise, bien que E-A Martel conteste la méthodologie de Belloc, basée sur des flotteurs en bois et des colorants en quantité trop faible pour constituer une preuve.
Entre 1928 et 1931, après une longue étude du massif des Monts Maudits, des bassins versants et des affluents, Norbert Casteret est convaincu de l'hypothèse selon laquelle les eaux du Trou du Toro font résurgence dans le val d'Aran et constituent la Garonne naissante.
Le projet d'une compagnie espagnole de détourner les eaux du Trou du Toro pour créer une usine hydro-électrique presse le spéléologue de démontrer l'hypothèse, puisque le captage priverait en aval la Garonne de la moitié de son débit et aurait des conséquences importantes en France. Grâce au soutien de Alfred Lacroix, secrétaire de l'Académie des sciences, d'E-A Martel, à des subventions de l'Académie des sciences, du conseil général de Haute-Garonne et au montant du prix Martel reçu par Casteret, il réunit la somme nécessaire à l'achat d'une quantité suffisante de fluorescéine pour mener une expérience de coloration.
Le 19 juillet 1931, soixante kilos de fluorescéine sont déversés au trou du Toro par Norbert et Elisabeth Casteret. À l'arrivée de l'équipe au val d'Aran quelques heures plus tard, ils découvrent la résurgence colorée en vert et prouvent ainsi la communication.
Les eaux de la Garonne parcourent ainsi quatre kilomètres sous terre pour passer du bassin versant de la Méditerranée à celui de l'océan Atlantique. L'expérience met un terme au projet de détournement.
Source « La Balaguère » :
Il faudra attendre l’expérience de Norbert Casteret en 1931 pour que le doute soit levé.
Le célèbre spéléologue passe en douce la frontière et déverse dans le Forau dels Aigualluts un puissant colorant.
Surprise pour les uns, confirmation pour les autres, quelques heures plus tard les eaux de l’Œil de Jupiter se tintent d’une belle couleur vert fluo.
La preuve est faite.
Piqués au vif, et dépossédés de la paternité de leur fleuve emblématique, les Aranais situent désormais les vraies sources de la Garonne au Pla de Beret près de la station de Baqueira. L’honneur est sauf !
Selon les conventions, c’est bien ce torrent issu du glacier de la Maladetta à une altitude bien supérieure à celle de Pla de Beret, qui est retenu en France comme source du fleuve. L’itinéraire prévu doit d’abord remonter la vallon de Pomèro pour rejoindre le Col de l’Escalette, situé sur la frontière, puis au-delà, le Port de la Picade.
Pourtant annoncé beau, le temps n’est pas au top.
En face, le haute vallée qui mène au Coll de Toro (Coth deth Horo en Aranais et Col du Taureau en bon Français). C’est par là qu’il nous prévoyons de rentrer et ça a l’air bien pentu.
Le panneau indicateur est sans ambiguïté : Le Port de la Picade (Port dera Picada), c’est par là !
Quelques lacets en forêt dans le brouillard et le premier obstacle se présente : le ruisseau de Pomèro à franchir sur une passerelle qui a été souvent malmenée par les crues du torrent.
De suite après, il faut abandonner la piste pour partir à gauche, dans l’axe de la vallée. Très vite, nous sortons des nuages.
Le Coll de Toro avant qu’il ne se recache.
Pour nous, c’est tout droit.
Un petit torrent se perd en plongeant dans un trou sous une barre rocheuse.
Les iris des Pyrénées et les gentianes sont très abondants dans ce secteur.
Ainsi que les marmottes.
Le sentier continue sa montée et la vallée se resserre. En bas, Artiga de Lin est toujours dans les nuages.
Nous sommes maintenant au Pas de l’Escalette, col situé sur la frontière. Sur la droite, arrive un sentier qui vient de L’Hospice de France, près de Bagnères de Luchon.
Pour La Picade, il faut encore monter. Par contre, le vent est violent et pas chaud du tout.
De l’autre côté du Port de la Picade, le paysage change. Bien ennuagé, le Massif de la Maladeta (ou Monts-Maudits) est juste en face.
Le refuge de La Rencluse. C’est le camp de base de ceux qui veulent monter sur le toit des Pyrénées : le Pic de l’Aneto (3404 m).
Au loin, nous apercevons maintenant le but de notre randonnée : le Forau d’Aiguallut, improprement nommé par les Français « Trou du Toro ».
De l’eau descend en abondance de la montagne et forme une cascade, mais en aval, rien ne coule. C’est évident qu’il y a un problème..
En attendant, il nous faut perdre 600 m d’altitude depuis le col pour rejoindre La Besurta. C’est le terminus de la route qui monte de l’Hospital de Benasque : des navettes déposent ici leurs chargements de touristes espagnols qui vont se faire photographier au Forau.
Nous ne traînons pas dans le coin, d’autant plus qu’il faut maintenant entamer une remontée.
Le Forau est en vue. Effectivement, rien ne coule dans la vallée.
En plus de constituer une curiosité géologique, ce site est d’une grande beauté.
Il faut imaginer que, lors de son parcours souterrain, l’eau prend une direction opposée à celle qu’elle a suivie jusque ici. Totalement surprenant et contraire à la logique !
Une fois au fond du trou, l’eau s’infiltre dans un lit de sable en quelques dizaines de mètres.
Au dessus de la cascade, il y a du monde : ce replat devrait s’appeler « Aiguallut-plage »...
Nous devons maintenant continuer à monter vers le Coll de Toro : avec les panneaux, impossible de se tromper...
Derrière, la Maladetta est toujours dans les nuages.
En partie dans embrumés aussi, le Pic de Sauvegarde, celui de la Mine et le Port de Venasque entre les deux. Là, c’est la frontière et l’Hospice de France est derrière, mais très bas.
Le col et toujours des touristes.
Voilà pourquoi : derrière l’encolure, il y a le Lac du Col du Taureau (ou Ibon de Coll de Toro ou encore Lac deth Coth deth Horo).
Pour passer de l’autre côté, il faut franchir l’éboulis de gauche. Pas du tout agréable...
Ensuite, plus âme qui vive.
Et enfin, on découvre Artiga de Lin : c’est encore loin et surtout 800 m plus bas !
Ce matin, nous redoutions la rudesse de cette pente. Nous avions raison car la prudence a rendu cette descente très longue et fatigante et c’est avec un grand soulagement que nous retrouvons des pentes plus humaines.
Le parking est vite rejoint mais la visite n’est pas finie.
Quelques centaines de mètres plus bas se trouve le site du Goueil de Jouéou ou Oeil de Jupiter. Bref, la résurgence !
Il faut monter quelques marches pour se trouver au dessus de la sortie.
Ici, l’eau sort de partout en abondance.
Voilà la boucle est bouclée.
Par contre, nous avons observé attentivement la couleur de l’eau et nous n’avons trouvé aucune trace de la fluorescéine de Norbert Casteret !
A bientôt.